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Le dernier livre de l’enseignant-chercheur en philosophie a été largement salué par la critique. Paru chez Actes Sud en 2020, l’ouvrage est rédigé comme un essai pour lutter contre le sentiment d’impuissance qui domine face à la catastrophe écologique en marche.
“Raviver les braises du vivant”. Une expression à la fois mystérieuse et poétique, militante et pleine d’espoir, pour un récit à la fois sérieux et exigeant, engagé et convaincant. Baptiste Morizot, 38 ans, maître de conférences en philosophie, s’est d’abord fait remarquer pour son engagement en faveur de l’écologie, avant d’être connu pour la qualité de ses ouvrages. Citons par exemple Sur la piste animale (2018) où l’auteur, de Yellowstone aux crêtes au Kirghizstan, du Haut-Var au Grand-Nord canadien, avait entraîné le lecteur sur les traces des grands prédateurs. Il y avait aussi évoqué le concept “d’enforestement” qui consiste à porter son attention sur le vivant simultanément autour de nous et en nous, et apprendre à cohabiter avec lui. Un thème qui s’est d’ailleurs largement imposé dans la pensée de l’écologie ces dernières années.
Avec son nouveau livre “Raviver les braises du vivant”, Baptiste Morizot pousse encore plus loin la réflexion dans un essai de haute tenue d’environ 200 pages. Ce grand randonneur utilise une fois encore sa méthode fétiche : mêler des observations de terrain avec une réflexion philosophique qui cherche à convaincre, plutôt qu’à imposer un point de vue. Ici, le point de départ est une randonnée dans « une réserve de vie sauvage », c’est-à-dire 500 hectares de forêt dans le Vercors acquis par l’Association pour la protection de la vie sauvage (ASPAS).
Sa démarche ? Partir à la découverte des nouvelles pratiques mises en place par différents acteurs pour préserver le plus possible les sols, les cultures, les animaux. Le philosophe-randonneur évoque aussi bien les lombrics que les pulvérisateurs, les forestiers que les cultivateurs…
Un récit contre le pessimisme ambiant
Baptiste Morizot écrit dans une langue exigeante et profonde, qui demande du temps et de la compréhension, avec des phrases ciselées : « Le vivant n’est pas une cathédrale en flammes, c’est un feu qui s’éteint. Le vivant est le feu lui-même ; un feu germinatif. » Ou celle-ci encore : « Si on ne se pense plus comme des humains face à la nature, mais comme des vivants parmi les vivants, on ne protège plus la nature comme altérité-sauvage, ni la nature comme altérité-ressource fragile : on défend la communauté des vivants dont nous sommes des membres, qui nous maintient en vie et qui nous fait. »
C’est là tout le message de ce maître de conférences à l’université d’Aix-Marseille : contre le pessimisme ambiant concernant l’écologie (dont le paroxysme s’illustre dans la collapsologie), il faut créer un espace à partager entre tous les vivants malgré leurs intérêts discordants, voir conflictuels : écologistes, paysans, ruraux, animaux…Pour cohabiter intelligemment, il faut donc dresser une cartographie des bonnes pratiques, comme la permaculture, la réintroduction d’espèces sauvages, l’instauration de zones de friche… C’est ce qui permettra de lutter contre l’extinction de la biodiversité et à terme, de celle du genre humain. Alors que les rapports scientifiques de plus en plus alarmants, la multitude de solutions évoquées donne un grand sentiment d’espoir. Comme une invitation à la renaissance.